Seconde édition.
Après la condamnation de 1857 et la suppression de six poèmes, Baudelaire doit recomposer son recueil. En plus des 35 poèmes nouveaux, l’autre grande nouveauté est l’introduction de la section Tableaux parisiens ; l’ordre des sections de 1857 est d’ailleurs modifié – bref, elle diffère amplement de l’édition originale, d’où la formulation, certes audacieuse mais explicite, de seconde édition originale … (La nouvelle édition de La Pléiade devrait enfin – paraît-il – publier ces deux éditions distinctement).
Le portrait est bien celui donné par Poulet-Malassis, c’est-à-dire gravé sur le vélin, signature soulignée de Bracquemond, Charles Baudelaire et Imp. Delatre en écriture cursive. Il manque parfois aux exemplaires précise Launay (Bibliographie des publications de PM, n°141). Quand il existe, c’est avec la plus grande fantaisie : variété des papiers et diversité des états (avant la lettre avec seulement les signatures de Bracquemond et Delatre ; avec le nom CH. BAUDELAIRE en capitales maigres au-dessous du portrait ; avec le nom de Baudelaire et, au-dessus du portrait, la mention « L’Artiste » en capitale éclairées, ce tirage à part étant, on le sait, intervenu plus tard ; avec la griffe « Alliance des Arts », etc.
Exemplaire offert par Baudelaire à son ami le sculpteur Ernest Christophe (1827-1892) – deux pièces du recueil lui sont dédiées – ce dernier le fit relier à son goût, avec son ex-libris.
Cet élève de Rude est celui qui a réconcilié Baudelaire avec la sculpture, si malmenée dans le Salon de 1846. Ils se sont rencontrés au début des années 1850 et se sont retrouvés aux dimanches de Mme Sabatier où Christophe se rendait en compagnie d’un autre sculpteur, Préault. Il n’a pas dédaigné de participer à la « navette », par amitié pour le poète, car il n’avait pas besoin de cette ressource, ayant une fortune personnelle. Il mourra dans son hôtel particulier, 4 place de Malesherbes (André Billy, La Présidente et ses amis, p.187).
En 1855, lors de l’Exposition universelle, ayant lu les deux articles que Baudelaire avait publiés dans Le Pays (26 mai et 3 juin), il lui écrit : « J’espère que vous ne m’oublierez pas quand vous serez à la sculpture et que vous me vengerez un peu des tribulations de toutes sortes que j’ai éprouvées à l’endroit de ma statue. » Cette statue était La Douleur, dont une réduction en granit rouge orne le tombeau de Christophe au cimetière des Batignolles. Baudelaire ne put lui donner satisfaction, car un de ses articles, contre Ingres, avait été refusé par Le Pays qui confia à Louis Énault le soin de décrire sans talent les différentes sections de l’exposition.
Christophe n’exposait pas en 1859, ce qui n’empêche pas Baudelaire, qui fréquentait l’atelier de son ami, de faire un grand éloge du sculpteur dans le Salon de 1859. Il décrit La Comédie humaine qui devint Le Masque et qui inspira le poème de Baudelaire, puis la statuette représentant un squelette féminin prêt à partir pour la fête et qui inspira à Baudelaire Danse Macabre. Dans l’édition des Fleurs de 1861 les deux poèmes sont dédicacés à Christophe. De cette édition, Baudelaire lui a donné un exemplaire. (Claude Pichois & Jean-Paul Avice, Dictionnaire Baudelaire, Du Lérot, pp. 122-123)
Interrogé en 1866 par E. Crépet qui préparait son livre, publié l’année suivante, Christophe lui répondit : « J’ai en effet beaucoup connu Baudelaire. Le Baudelaire dont je me souviens est fort différent du Baudelaire légendaire. Celui que j’ai connu m’a toujours fait l’effet d’être simple comme un enfant, souvent victime de lui-même, très bon ami, et en somme, toute sa vie, dupe de lui-même, etc. » Cité par Pichois et Avice.
En comparaison avec l’édition de 1857 des Fleurs du Mal, Baudelaire a très peu dédicacé celle de 1861. Quant aux dédicaces imprimées, seuls six poèmes en possèdent ici, et deux sont pour Ernest Christophe …
D’après Fléty (20) le relieur Behrends exerçait durant le dernier tiers du XIXe siècle, 15 rue d’Argenteuil à Paris.
Une petite restauration marginale page 31, le dos est légèrement passé – très agréable exemplaire cependant, d'une belle provenance (ce qui est rare).